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Zoom sur Manu Katché

Portraits de musiciens #1 - Manu Katché

Portraits de musiciens #1 : Manu Katché

 

Cela faisait longtemps que nous souhaitions publier des portraits de musiciens d’exception. Nous commençons avec une rétrospective de la carrière de Manu Katché, célèbre batteur français (mais aussi auteur – compositeur) que nous aimons particulièrement chez Hifi Link. Son jeu est délicat, très chantant, jamais « m’as-tu-vu », souvent presque en retrait vis-a-vis des autres musiciens, et en tout cas toujours à leur service. Et il ne se contente pas de frapper les fûts, mais les fait littéralement chanter, pour notre plus grand bonheur…

  • Présentation du batteur :

Manu Katché est né en 1958, d’une mère française et d’un père ivoirien. Vers sept ans il pratique le piano, avant de commencer la batterie et les percussions au conservatoire. Il étudie notamment au CNSM de Paris. Très doué, il est vite repéré et est engagé comme batteur et arrangeur sur l’album « Unis vers l’Uni » de Michel Jonasz en 1985, puis en 1986 sur l’album So de Peter Gabriel – deux albums qui l’ont vraiment fait connaitre.

unis vers l'uni michel jonasz so peter gabriel

Au cours de sa carrière, Manu Katché a accompagné nombreux musiciens et groupes tous plus incroyables les uns les autres : on retiendra, pour ne citer qu’eux, Francis Cabrel, Jean-Jacques Goldman, Louis Bertignac, Jeanne Mas, Mireille Mathieu, Laurent Voulzy, Michel Jonasz, mais encore Marcus Miller, Joni Mitchell, Michel Petrucciani, Manu Dibango, les Bee Gees, les Gipsy Kings, Dire Straits, Sting…

Manu Katché a aussi largement œuvré pour le monde du jazz, à travers ses nombreux disques, comme auteur – compositeur et batteur. On retient notamment quatre de ses disques majeurs, tous parus chez l’excellent label ECM (le label de Keith Jarrett, dont Katché dit avoir été fasciné pendant son adolescence) : Neighbourhood (2005), Playground (2007), Third Round (2010) et Manu Katché (2012). Quatre disques teintés de l’univers musical très particulier du batteur (nous détaillons quelques-uns de leurs titres ci-après).

Enfin le grand public le connait aussi largement depuis sa participation au jury de l’émission Nouvelle Star sur M6, de 2004 à 2007.

  • Son matériel :

Manu Katché a longtemps joué des batteries Pearl, avant d’être choisi par Yamaha pour jouer les fûts et le matériel de la marque (stands, pédales…). Il joue depuis la série Oak Custom de chez Yamaha. La configuration du kit est classique – fûts de 12″, 13″, et 16″ pour les toms aigu, médium, et basse ; grosse caisse de 22″, et caisse claire « Manu Katché Signature » de 14″ en cuivre finition noire. Cette caisse claire porte bien son nom, car avec quelques cymbales très particulières, elle constitue la véritable signature du jeu du batteur.

Parlons cymbales, justement : Manu Katché joue des cymbales Zildjian. Il joue deux crashs de 16 et 18 pouces, une ride de 21 pouces propice au swing dans le jazz, et surtout, ce qui fait là encore la signature de Katché, deux petites cymbales Splash de 6 et 8 pouces, au son très caractéristique (voir photo en tête de l’article).

Sa batterie est accordée toujours de la même façon (avec des légères nuances selon les contextes) : les toms sont plutôt détendus, avec une belle résonance sur le tom basse, tandis que la caisse claire est accordée plutôt aigue et sèche ; et Manu Katché aime la jouer en rimshot (technique consistant à frapper à la fois la peau et le cercle du fût, de sorte à faire chanter le fût plus dans l’aigu).

Nous recommandons, pour écouter les disques de Manu Katché, d’utiliser des systèmes très transparents, et très lisibles et rapides dans le grave (pour une bonne retranscription des toms et du kick de la grosse caisse). Une enceinte dotée des mêmes qualités sera aussi la bienvenue (les enceintes Esprit par exemple).

  • Quelques-uns de ses disques

Nous détaillons ici nos impressions sur certains titres, mais bien sûr cette sélection n’est pas exhaustive et tous les titres de Manu Katché sont remarquables et dignes d’intérêt !

  • Neighbourhood (2005)

Neighbourhood manu katche

Disque emblématique, le premier de Manu Katché chez ECM, sous l’aile du producteur Manfred Eicher. On y retrouve Jan Garbarek au saxophone, Marcin Wasilewski au piano, Tomasz Stanko à la trompette, et Slawomir Kurkiewicz à la contrebasse.

Le disque s’ouvre avec le titre November 99, morceau relativement lent et contemplatif, laissant la mélodie du thème au contrebassiste. On remarque déjà quelques attributs essentiels du jeu de Manu Katché : sobriété, jeu subtil sur la ride et les dômes de cymbales, et caisse claire jouée en rimshot. A 2 min 34, débute un solo de piano épuré mais envoûtant, développant des phrases en doubles-croches qui appellent le batteur à dédoubler son jeu notamment sur les cymbales, et à intercaler des roulements.

Plus tard dans le disque Neighbourhood, on trouve le titre No Rush (piste 6), particulier pour sa métrique : c’est une mesure à 7 temps. Les mesures impaires se sont largement généralisées dans le jazz depuis le début des années 2000, et Manu Katché n’a pas manqué de se plier à cet exercice de composition périlleux. On note que le pont (partie du thème qui change de tonalité) est lui, classiquement à 4 temps, ce qui crée un contraste et un moment d’apaisement. Ecoutez la diversité des frappes sur la caisse claire, là encore Katché fait véritablement « chanter » son fût, plus que de simplement le frapper.

Un dernier titre de cet album que nous trouvons remarquable : Take Off and Land (piste 8). Manu Katché y cache dans son jeu une série de ghost-notes sur la caisse claire, qui enrichissent sa palette d’expression (les ghost-notes sont des petits coups en arrière plan, à peine joués, augmentant le contraste sur le jeu de la caisse claire).

Et pour retranscrire son jeu sur une chaine haute fidélité ?

L’emploi d’un amplificateur intégré hybride – ou d’un pré-ampli à tubes, est tout à fait propice à l’écoute de ce disque, pour sublimer le côté vivant et organique du jeu de Manu Katché. On peut aussi éventuellement utiliser des blocs de puissance à tubes, à condition qu’ils soient dotés d’une marge de puissance suffisante, pour ne pas trop arrondir les attaques et les timbres.

 

  • Playground (2007)

Playground manu katche

Même pianiste et même contrebassiste, on retrouve le style de l’album précédent dans Playground. On vous suggère d’écouter So Groovy (Piste 4), titre punchy, qui laisse se développer un superbe solo de trompette de Mathias Eick. Dès l’exposition du thème (à 00 min 20), Manu Katché développe un jeu en rimshot plein de contretemps intercalés. La caisse claire dans ce morceau est épaisse, presque grasse (choix de prise de son et de mixage). Il est d’ailleurs intéressant de noter que dans les disques de Manu Katché, la même batterie étant accordée légèrement différemment à chaque piste, et les micros dynamiques étant placés de façon unique, on a parfois l’impression que le kit de batterie change et s’adapte à chaque morceau.

On est aussi séduits par le titre Clubbing (Piste 11) construit à partir d’un ostinato circulaire entre la contrebasse et le piano. Dans l’intro, le batteur donne de l’élan au morceau avec une série de frappes à contretemps sur la snare. Puis le jeu de Manu Katché en arrière plan se développe et finit par se déchainer pour notre plus grand plaisir. On se rend vraiment compte à l’écoute de ce titre à quel point Manu Katché est un batteur subtil, au service de ses musiciens, tout en étant capable d’une grande virtuosité. Quel tempo… Il faut le tenir !


Et pour sublimer au mieux cet album sur une chaine haute fidélité ?

Le kick (grosse caisse) sur cet album est relativement rond. L’idéal est donc de l’écouter sur un système très droit et vif. On suggère notamment l’emploi d’électroniques Ypsilon ou Karan (le pré-ampli LineA et le bloc PowerB stéréo par exemple), qui sauront rester très musicaux, tout en apportant une vivacité précieuse au système. Sans jamais vous fatiguer, bien évidemment.

 

  • Third Round (2010)

Third Round manu katche

Paru en 2010, Third Round (littéralement « reprise »), forme un tournant de maturité dans l’écriture de Manu Katché. Le titre Keep On Trippin’ (Piste 2) est quasiment un tableau figuratif. Alternance de thèmes, de ponts, de nappes, de solos… Le morceau commence par une courte masterclass du batteur sur la diversité de son jeu de cymbales (à écouter sur un système très résolutif et sans tendance à « monter », si l’on ne veut pas que le jeu du saxophone soprano se montre parfois agressif aux oreilles). On adore le son claquant et chantant à souhait de la snare (caisse claire) sur ce morceau…

Dans Being Ben (Piste 4), on aime entendre Manu Katché développer son jeu de toms et de splashs sur le thème. Thème qui s’intercale de brefs solos, ce qui donne l’impression de souvent changer de paysage musical. En effet, comme souvent chez Manu Katché, on n’a pas à faire à des formes classiques (du type exposition du thème – puis solos les uns à la suite des autres – puis ré-exposition du thème, toujours sur la même grille d’accords) ; non, c’est plus subtil, plus inattendu : on a des thèmes qui se développent en plusieurs parties distinctes, avec des phrases de transition, des courts chorus intercalés ci et là, et le tout donne souvent la sensation d’une musique qui vit, et se développe spontanément, de façon très organique.

On aime aussi (entre tous les autres) le court morceau Out Take Number 9 (Piste 7), laissant entendre le jeu subtil sur le charleston, et la diversité d’accents et de timbres sur la caisse claire, de la ghost-note à au fortissimo.

Et pour retranscrire la magie de cet album sur une chaine haute fidélité ?

Nous avons écouté ce disque au showroom sur le système suivant (et c’était une merveille) :

 

  • Manu Katché (2012)

Short Ride Manu Katché

Enfin, l’album éponyme sorti en 2012, continue de nous enchanter… Manu Katché y est accompagné du saxophoniste Tore Brunborg, de Jim Watson au piano et à l’orgue Hammond, et de Nils Petter Molvaer à la trompette. On apprécie Running After Years (Piste 1) qui commence avec la batterie en solo, mettant l’accent sur les deux petites cymbales Splash de 6 et 8 pouces, si chères au batteur.

Dans Loose (Piste 9), à la suite de la ré-exposition du thème, on se régale avec un solo du batteur, mêlant accents, roulements de toms, et explosion de cymbales. (Les solos de Manu Katché sont si rares !)

Et on vous recommande aussi Short Ride (Piste 6), qui, après une introduction en nappes de trompette et saxophone accompagnés par l’orgue Hammond, laisse partir Manu Katché « pleine balle » en swing sur sa ride (la plus grande des cymbales). D’une manière générale, on adore le son de cette ride, qui selon l’endroit où elle est frappée par le batteur, laisse entendre une diversité folle de sons, d’attaques, et de résonances (dôme, milieu, tiers, bord de la cymbale – avec tantôt l’olive, tantôt le « gras » de la baguette)…

Et pour retranscrire son jeu avec fluidité sur un ampli abordable ?

Pour sublimer les cinquante nuances de cette cymbale ride dans le jeu du batteur, rien de tel qu’un amplificateur très résolutif et texturé dans le médium-aigu, comme par exemple, une fois n’est pas coutume, le Canor Virtus A3.

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